Selon l’ordre du jour, la tonalité des échanges ou encore les enjeux stratégiques abordés en Conseil d’administration, l’administrateur se doit d’être un acteur multifacette : savoir adopter la juste posture pour le moment qui se joue.
On peut distinguer sept postures clés de l’administrateur, qui, tour à tour, se succèdent et se complètent : Vigie, éclaireur, tuteur, médiateur, challengeur, catalyseur, médiateur. Nous abordons dans ce premier épisode la notion clé de vigie.
Étymologiquement, le mot « vigie » est issu du latin vigilia, qui signifie vigile ou vigie. Mais qu’on peut traduire également par insomnie ! Car c’est bien là l’état de celui qui ne dort pas et qui veille donc, quand les autres dorment ou somnolent. Dans l’Antiquité Les vigiles sont d’abord les gardes de nuit, qui veillent à la sécurité de Rome.
La vigie fait preuve de vigilance, qui signifie aussi bien le fait de rester éveillé toute la nuit que l’état d’attention soutenue d’une personne. Dans l’héraldique du Moyen-âge, la vigilance est le nom de la pierre que la grue tient dans sa patte droite. La chute de la pierre la réveille, nous rappelant ainsi le devoir de rester en sentinelle vis-à-vis de ce qui peut advenir.
Plus tard, en termes de marine, la vigie est le matelot placé en observation dans la mâture ou à la proue d’un navire. Il est celui qui découvre à l’horizon les dangers de la route ou tout aussi bien la Terre nouvelle ou retrouvée.
Ces images correspondent très précisément au rôle de vigie attendu de l’administrateur pendant les séances du Conseil.
Faire preuve de vigilance c’est d’abord écouter avec la plus grande attention les propos échangés par les autres. Car comment poser la bonne question et comment argumenter si on n’entend pas vraiment ce qui se dit ? Vigilance et bienveillance sont très proches : il s’agit toujours de « bien veiller » à la parole dite pour pouvoir la prendre à propos.
C’est ensuite savoir se poster en observation « tout en faut de la mature » ou à l’avant du navire : l’administrateur vigie, c’est celui qui sait prendre de la hauteur et se porter au-devant de ce qui pourrait arriver. Il apporte l’information utile aux autres, qui ne la perçoivent pas encore. Nous parlons aujourd’hui de détection des signaux faibles, mais c’est bien ce qu’apercevait à l’horizon la vigie.
Également, le devoir de vigie est celui de protéger le collège que représente le Conseil d’administration ou le Conseil de surveillance : expression d’une mission de solidarité comme celle de protéger Rome ou de veiller au sort du navire.
Enfin et peut-être est-ce là le plus important, un administrateur sera vigilant vis-vis des habitudes et des routines. C’est le trait du non-conformisme – qui n’est pas l’anticonformisme – utile à déceler les changements de cap nécessaires dans une stratégie.
Exercer une vigilance soutenue exige donc à la fois discipline et vertus pour l’administrateur.
Discipline pour littéralement rester éveillé et bien veiller à être attentif à tous les signaux : les propos échangés en Conseil, le non-dit, la communication non verbale.
Vertus d’ouverture et de curiosité pour découvrir de nouvelles routes, vertus de courage et d’audace pour sortir de la routine et des conservatismes.
« Le prix de la liberté, c’est la vigilance éternelle » nous rappelle Thomas Jefferson. Administrateurs, n’hésitez pas à redoubler de vigilance dans l’exercice de vos mandats ! C’est le prix de votre liberté et c’est celui de l’intérêt social de l’entreprise.